Dans un arrêt du 13 février 2019, la Cour de cassation a eu l’occasion de constater qu’un salarié qui a abusé de sa liberté d’expression peut être licencié à ce titre (Cass. Soc., 13 février 2019, n°17-15928).
Les faits
Un salarié d’une association syndicale de formation de conseillers prud’hommes a été licencié pour avoir ouvertement, et de manière répétée, critiqué sa direction.
Au sein de plusieurs lettres à destination de sa hiérarchie, il a fait des critiques virulentes à l’encontre de ses supérieurs hiérarchiques : « injonction hiérarchique bête et méchante » ; dénonciation d’un directeur qui ment « effrontément » et qui joue au « caporal », président dont la « bonne foi » est remise en question, lettre du président et du directeur qualifié de « torchon » ayant « suscité le dégoût chez la plupart de ses lecteurs ».
Le salarié a saisi le conseil de prud’homme pour que son licenciement soit reconnu sans cause réelle et sérieuse en ce qu’il n’avait fait qu’user de sa liberté d’expression au sein de l’entreprise.
La Cour d‘appel de Paris l’a débouté de sa demande. Il a formé un pourvoi contre cette décision.
Abus de la liberté d’expression ?
La liberté d’expression est reconnue au salarié au sein et en dehors de l’entreprise dans la limite d’un abus de sa part.
Le salarié licencié arguait le fait qu’il était en droit de critiquer ses supérieurs ainsi que le fonctionnement de l’institution.
La Cour de cassation, qui a pris la peine d’énoncer les termes susvisés prononcés par lui a reconnu que les propos du salarié « constituaient un abus de la liberté d’expression ». Elle précise, en outre, que l'abus de la liberté d'expression doit s'apprécier "in concreto" et qu'il appartient aux juges du fond d'en justifier, néanmoins, elle rejette le pourvoi.
Apport
Le salarié dispose de sa liberté d’expression, y compris en entreprise, mais elle n’est assurément pas totale.
Ainsi, le fait de critiquer ouvertement ses supérieurs ou son entreprise de manière virulente et répétée, peut justifier un licenciement.
Pour baser la décision, il convient d'analyser les responsabilités qui lui sont confiées, le contexte des propos incriminés, la tolérance dont il a jusqu’alors pu être fait preuve, ou du franc-parler en usage dans l’entreprise.