Vidéosurveillance et RGPD : la preuve est licite.
- mm6367
- 30 mai
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Dernière mise à jour : 3 juin
Les faits et la procédure
Un salarié a été engagé le 1er octobre 2003 en qualité d’opérateur de sûreté aéroportuaire. À ce titre, il était notamment chargé du contrôle aux rayons X des bagages cabine des passagers transitant par un aéroport international.
Le 20 décembre 2019, deux comportements non conformes aux protocoles de sûreté ont été relevés à dix minutes d’intervalle :
– À 14h00, le salarié est observé en position perpendiculaire à l’écran RX, en violation des consignes imposant une posture frontale ;
– À 14h10, alors que le tapis de contrôle est en fonctionnement, il engage une conversation avec un passager, tournant entièrement la tête et négligeant l’inspection d’un bagage cabine.
Considérant que ces manquements caractérisent une violation grave des obligations contractuelles, l’employeur prononce le licenciement du salarié pour faute grave.
Pour établir la faute, l’employeur produit, en plus de témoignages et rapports, des constats fondés sur la consultation d’images issues du système de vidéosurveillance de l’aéroport.
Le salarié conteste le licenciement, reprochant à l’employeur d’avoir utilisé un système de surveillance sans respecter les exigences d’information posées par le RGPD,en particulier le défaut d’information préalable.
Débouté de sa demande par la Cour d’appel d’Amiens le 28 avril 2022 (n°21/03582), il forme un pourvoi en cassation, soutenant notamment que l’utilisation des images violait les articles 6, 7 et 12 à 15 du RGPD ainsi que ses droits à l'information et à la défense.
La décision
Par un arrêt du 21 mai 2025 (n°22-19.925), la chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi.
La Cour de cassation rappelle que l’utilisation d’un système de vidéosurveillance dans un lieu de travail relève du RGPD, notamment son article 4, et que, par conséquent, l’employeur est tenu de se conformer aux exigences de licéité, de transparence, de limitation des finalités et d’information de la personne concernée.
En l’espèce, la Cour de cassation constate que le système de vidéosurveillance installé dans l’aéroport avait fait l’objet de déclarations régulières à la CNIL, et qu’il était dûment autorisé par arrêté préfectoral.
Le dispositif, mis en place par la société gestionnaire de l’aéroport, visait une finalité clairement définie et légitime : assurer la sécurité des personnes et des biens dans un environnement particulièrement exposé aux risques.
Si ce système n’avait pas pour objet premier de surveiller les salariés, ceux-ci, comme les autres personnes présentes sur le site, avaient été informés de l’existence de la vidéosurveillance par un affichage visible comportant un pictogramme ainsi que des informations sur le droit d’accès aux données. En outre, les représentants du personnel avaient été informés de la mise en place du dispositif.
Enfin, une procédure interne, régulièrement mise à jour, encadrait l’accès aux enregistrements, réservant leur visionnage à un nombre limité de personnes habilitées, pour une durée de conservation de cinq jours maximum.
Pour l'ensemble de ces raisons, la Cour de cassation juge que les images de vidéosurveillance produites par l’employeur sont recevables comme moyen de preuve, d'autant plus que celles-ci ont été soumises au débat contradictoire devant les juges du fond, le salarié ne justifiant pas avoir demandé à accéder à celles-ci en amont.
Les droits de la défense n'ont donc pas été méconnus.
Par ailleurs, la Cour de cassation estime que les manquements reprochés au salarié, bien qu'isolés et non précédés d’un avertissement disciplinaire, compromettent directement l’une des obligations contractuelles essentielles de son poste et donc, que son maintien dans l’entreprise était impossible malgré seize années d’ancienneté.
L'apport de la décision
La présente décision de la Cour de cassation s’inscrit dans la continuité de sa jurisprudence antérieure : les preuves issues de la vidéosurveillance sont recevables, à condition de respecter strictement les exigences du RGPD.
En effet, la Cour de cassation admet la vidéosurveillance des salariés à condition que le dispositif ait été porté à leur connaissance (Cass. soc., 20 nov. 1991, n° 88-43.120), les images en étant issues pouvant fonder une sanction disciplinaire uniquement à cette condition (Cass. soc., 7 juin 2006, n° 04-43.86).
La Cour réaffirme ici l’exigence de transparence et de proportionnalité, en particulier dans des environnements à haute sensibilité sécuritaire, tels que les zones aéroportuaires.
En effet, cet arrêt s’inscrit dans une logique de proportionnalité du contrôle, la Cour de cassation ayant déjà jugé que la disproportion vis-à-vis de la finalité rendait la preuve devient inexploitable (Cass. soc., 23 juin 2021, n° 19-13.856).
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