
deux décisions récentes doivent amener à la plus grande vigilance sur les liaisons au temps et lieux de travail
Le principe : y compris au temps et lieu de travail, tout salarié a le droit au respect de sa vie intime et privé. Ainsi Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail.
Deux décisions sont venues modérer ce principe et apporter des précisions :
Ainsi la Cour d'appel de Bordeaux (CA Bordeaux, ch. soc. sect. a, 17 avr. 2024, n° 21/01972.) a eu à juger l'espèce suivante :
Faits : Un salarié a été embauché en tant que directeur des ressources humaines en 2016. Il a entretenu une liaison avec une salarié de l'entreprise qui a, en mars 2019, informé l’employeur avoir déposé plainte pour violences et agressions sexuelles contre le directeur des ressources humaines. Ce dernier, a alors proposé à l’employeur une rupture conventionnelle de son contrat de travail. si celle-ci a été envisagée, elle n'a pas pu aboutir les parties n'arrivant pas à s'accorder sur les modalités financières de la rupture. La société a licencié le salarié pour faute grave, en mai 2019, en invoquant un manquement à son obligation d'exemplarité ainsi que le retentissement de ces actes sur l'entreprise.
Procédure : Le 24 juillet 2019, le directeur des ressources humaines a saisi le Conseil de Prud’hommes de Bordeaux afin d’obtenir le paiement d’indemnités et notamment l’indemnité conventionnelle de licenciement, l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents ou encore des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le Conseil de prud’hommes juge que le licenciement repose sur une faute grave et qu’il est fondé et régulier. Le directeur des ressources humaines interjette appel de ce jugement.
Solution : La Cour d’appel de Bordeaux a validé le licenciement intervenu en indiquant qu’en "qu'en entretenant une relation intime avec la salariée de l’entreprise, Le salarié, a contrevenu à l’obligation de neutralité pesant sur un directeur des ressources humaines et manqué à l’obligation de loyauté à l’égard de son employeur qu’il n’avait pas informé de sa situation personnelle et des conséquences de celles-ci sur l’exercice de ses fonctions.
Malgré la présomption d’innocence dont bénéficie le salarié concernant la plainte déposé, l’entreprise peut le licencier pour faute grave pour les mêmes faits car ils constituent, par ailleurs un manquement aux obligations professionnelles.
Position confirmée dans son principe par la Cour de cassation (Cass. soc., 29 mai 2024, n° 22-16.218, Publié au bulletin) qui a pu juger s'agissant de l'espèce suivante :
Faits : Un salarié a été embauché en tant que Responsable de Site depuis le 29 avril 2002, a entretenu une relation intime avec une salariée qui détenait, par ailleurs plusieurs mandats syndicaux et de représentante du personnel. Cette relation a été dissimulé à l'employeur. La salarié a quitté l'entreprise et a intenté un action prud'homale à l'encontre de l'entreprise. Le 4 septembre 2014, la salariée a avisée l'employeur de sa relation avec le responsable de site. Il a été licencié pour faute grave, le 27 septembre 2014, l'employeur invoquant qu'en dissimulant sa relation il s'est placé en "conflit d’intérêt entre la défense des intérêts de l’entreprise et les légitimes intérêts que vous portez à votre conjointe".
Procédure : Le directeur de site a il a saisi la juridiction prud’homale de demandes en annulation de son licenciement, réintégration et subsidiairement en contestation du bien fondé de la rupture de son contrat de travail ainsi qu’en paiement de diverses sommes. Il a d'abord eu gain de cause en référé, mais cela a été infirmé par la Cour d'appel de NIMES et son pourvoi rejeté. Dans ces conditions, la Cour d'appel de NIMES (CA Nîmes, 5e ch. soc. ph, 15 mars 2022, n° 18/03365) a validé le licenciement pour faute grave pour manquement à son obligation de loyauté et conflit d’intérêt.
Solution : La Cour de cassation (Cass. soc., 29 mai 2024, n° 22-16.218, Publié au bulletin) a validé l'analyse de la Cour d'appel de NIMES en ce qu'il n'était pas basé sur des éléments relevant de sa vie privée mais sur l'existence d'un conflit d'intérêt professionnel induisant un manquement à l'obligation de loyauté du Directeur de Site qui avait eu en gestion des conflits collectifs où sa conjointe était intervenue sans en avertir son employeur.
Portée
Dans ces deux affaires le licenciement portait sur des membres de l'encadrement ayant dissimulé leur relation intime avec des subordonnées alors qu'ils avaient des postes clefs dans l'entreprise, ce faisant l'existence de ces relations avaient un retentissement plus important et pouvait constituer des manquements contractuels, tel ne sera pas nécessairement le cas pour des salariés non cadres. Les faits de l'espèce ont compté dans l'analyse de la validité des licenciements. affaires à suivre...
Comments