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L'abus de la liberté d'expression peut motiver un licenciement disciplinaire



Dans deux arrêts rendus à la même date le 12 juin 2019, le Cour de cassation est venue rappeler qu'un salarié a abusant de sa liberté d’expression peut être licencié. (Cass. Soc., 12 juin 2019, 17-24589 & Cass. soc., 12 juin 2019, n° 17-19.299)


En droit

Pour mémoire, le salarié, comme tout individu, dispose de la liberté d’expression, et ce également au sein de l’entreprise en ce que « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché » (C. trav. art. L.1121-1). La protection du salarié s’arrête, toutefois, en cas d’abus de sa part quant à l’exercice de cette liberté.


En l’espèce

Dans ces deux dossiers, les salariés ont été licenciés pour motif disciplinaire après avoir eu des propos/écrits virulents à l'encontre de leurs employeurs.


  • Le premier salarié a été licencié pour faute grave pour avoir, par deux lettres diffusées à des personnes extérieures, ouvertement critiqué le fonctionnement de son employeur sous la nouvelle présidence. Ces propos ont été les suivants « politique qui bafoue la vérité », menée par un « homme ne disposant d’aucune légitimité réelle ». En outre, le salarié dénonce la « folie destructrice » qui s’est emparée de l’association. Le salarié en profite également pour former des accusations à l’encontre de partenaires de l’association, dénonçant le « pouvoir quasi dictatorial » au sein de l’UIMN et du MEDEF exercé par « une poignée d’individus, hors de contrôle patronal et social réel ». Il apparaît que les propos du salarié interviennent dans un contexte particulier, son épouse ayant été licenciée pour insuffisance professionnelle par cette structure, il y fera référence en ces termes « mon épouse sacrifiée au nom d’intérêts supérieurs ».


  • Le second salarié a été licencié pour faute grave pour avoir « apostrophé le gérant devant des clients » et « contester ouvertement les décisions de la direction ». En effet, son employeur sur un bateau et lui sur le quai, il s’est « emporté en criant que tout ce qui se passait dans la société le concernait et qu’il demandait des explications ». Il convient de préciser que le comportement « agressif et contestataire » du salarié est lié à une décision prise par son employeur à l’encontre d’un de ses collègues de travail. Le salarié conteste son licenciement, intervenu après un refus de sa part d’une proposition de modification de son contrat de travail portant rétrogradation à titre de sanction. Il considère que son employeur n’a pas caractérisé un abus dans l’exercice de sa liberté d’expression. Il estime, en outre, que ces propos constituent une alerte de sa part sur des dysfonctionnements internes.


Décision de la cour de cassation

Dans ces deux espèces, la Cour de cassation a validé le motif disciplinaire pris à l'appui des procédures rappelant que l'analyse de l'abus de la liberté d'expression appartient au juge du fond.


La Cour de cassation a retenu, toutefois, des éléments de faits pour entériner la décision, notamment en prenant en compte l'ancienneté ou les fonctions des salariés, la présence de témoins ainsi que la virulence des propos.


Apport

Si la liberté d’expression est un droit du salarié dans l’entreprise à laquelle l’employeur ne saurait apporter des restrictions disproportionnées, le fait pour le salarié de commettre un abus l’expose à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement.


L’abus est caractérisé dès lors que le salarié tient des propos injurieux, diffamatoires ou excessifs. Ainsi, le salarié qui critique ouvertement son employeur, au nom d’intérêts purement privés, dans des lettres adressées à des personnes extérieures à la société et en relation avec elle s’expose à un licenciement.


S’agissant de la publicité de propos injurieux tenus sur un groupe Facebook privé nos avocats ont eu l'occasion d'en expliquer les conséquences juridiques => ici.


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