Accident du travail : la reconnaissance par la CPAM ne lie pas le juge en cas de demande de nullité du licenciement
- INVICTAE
- il y a 4 minutes
- 4 min de lecture

Les faits et la procédure
Une salariée a occupé un poste en qualité d’opérateur au sein d’une entreprise dans le cadre d’un contrat de mission débuté le 7 janvier 2019 et renouvelé jusqu’au 5 juillet 2020.
Le 30 juin 2020, elle a déclaré avoir été victime d’un accident du travail, à la suite d’une chute dans les locaux de l’entreprise. Elle a été conduite à l’hôpital et arrêtée du 30 juin au 15 juillet 2020. Cet arrêt de travail a été pris en charge par la CPAM au titre de la législation sur les accidents du travail.
Le 9 avril 2021, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes de Louviers afin d’obtenir la requalification de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée, ainsi que diverses demandes indemnitaires. Elle sollicitait également que le bénéfice de la législation protectrice applicable aux salariés victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.
Par jugement du 20 septembre 2021, le conseil de prud'hommes a fait notamment droit à la demande de requalification du contrat de travail en contrat à durée indéterminée. Elle a été déboutée de ses autres demandes.
La salariée a interjeté appel le 16 octobre 2021 et demande à la cour d’appel de Rouen d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de l’ensemble de ses autres demandes. Elle sollicite en outre que soit prononcée la nullité de son licenciement, celui-ci étant intervenu alors qu’elle était en arrêt pour accident du travail.
Par une décision du 21 décembre 2023, la cour d’appel de Rouen a confirmé le jugement de première instance et a débouté la salariée de sa demande de nullité de la rupture du contrat de travail.
Elle a rappelé que la reconnaissance d’un accident du travail par la CPAM ne lie pas le conseil de prud’hommes et ne saurait, à elle seule, suffire. Il appartient à la partie concernée de produire d’autres éléments de nature à corroborer la réalité de l’accident, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.
La salariée s’est, par conséquent, pourvue en cassation.
La décision
Par son arrêt du 10 septembre 2025 (Cass., Soc., 10 septembre 2025, n°24-12.900), la Cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel en affirmant que « la prise en charge d'une arrêt de travail au titre de la législation sur les risques professionnels n'est pas de nature à constituer à lui seul la preuve de l'origine professionnelle de l'accident et il appartient au juge, en cas de contestation de l'existence de cet accident, de former sa conviction, au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis par les parties ».
L’apport de la décision
La Cour de cassation avait déjà rappelé que la prise en charge d’un arrêt de travail au titre de la législation sur les accidents du travail ne constitue pas à elle seule la preuve de l’origine professionnelle de l’accident (Cass., Soc., 31 mars 1993, n°89-40.711).
L’arrêt du 10 septembre 2025 illustre une fois encore cette solution, en précisant l’approche que doivent adopter les juges du fond pour apprécier si l’accident relève ou non d’une origine professionnelle.
L’arrêt rappel ainsi que :
Il appartient aux juges du fond, dans le cadre de leur pouvoir souverain d’appréciation, de se prononcer sur l’existence et la réalité du caractère professionnel d’un accident ou d’une maladie.
Ils doivent fonder leur appréciation sur l’ensemble des éléments versés aux débats par les parties, sans pouvoir se limiter à la seule décision de la CPAM.
Il peut s’agir d’éléments tels que des témoignages, des documents relatant les circonstances de l’accident, ou encore des expertises médicales.
En l'espèce la Cour de cassation a pu constater que la Cour d'appel a formé sa conviction en prenant en compte les éléments soumis par les parties. La cour d’appel avait relevé l’absence d’attestations de témoins, de précisions sur les circonstances exactes de l’accident, et l’absence de lésions physiques visibles ou de preuves médicales confirmant l'existence de l'accident du travail.
Par conséquent, l’existence de l’accident du travail n’était pas établie.
Cette décision a des conséquences importantes tant pour le salarié que l’employeur.
D’une part, pour un salarié, la reconnaissance de l’accident du travail par la CPAM constitue une preuve importante, mais elle ne suffit pas à établir de manière certaine le caractère professionnel d’un accident ou d’une maladie si d’autres éléments de preuve ne sont pas apportés.
D’autre part, pour un employeur, la prise en charge d’un arrêt de travail en tant qu’accident du travail ne présume pas automatiquement de son caractère professionnel. Une contestation peut être portée devant les prud’hommes si des éléments sérieux remettent en cause la réalité ou les circonstances de l’accident.
Vous avez été victime d'un accident du travail, puis licencié? L'un de vos salariés vous a attrait au prud'hommes en annulation de son licenciement souhaitant bénéficier de la protection AT/MP ?
N'hésitez pas à vous rapprocher de nos Avocats qui peuvent analyser vos documents et vous conseiller sur vos droits.





