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Reconnaissance du harcèlement moral institutionnel : la Cour de cassation valide les condamnations.

Dernière mise à jour : 6 févr.

Par un arrêt du 21 janvier 2025, la chambre criminelle de la Cour de cassation vient rendre son arrêt dans l'affaire dite "FRANCE TELECOM" (cass.crim 21 janv. 2025, n°22-87.145, publié au bulletin et au rapport)


Les faits

Un plan de réorganisation NExT, pour "Nouvelle expérience des télécommunications" avait été déployé au sein de France TELECOM où des suppressions de poste sans licenciement avait été annoncé (mutation et courbe de départ classique) mais où les cadres supérieurs ont employé des « méthodes » destinées à convaincre les salariés réticents de quitter d’eux même les effectif, en utilisant notamment :

* des réorganisations multiples et désordonnées ;

* des incitations répétées au départ ;

* des mobilités géographiques et/ou fonctionnelles forcées ;

* la surcharge de travail, la pression des résultats ou à l’inverse l’absence de travail ;

* un contrôle excessif et intrusif ;

* l’attribution de missions dévalorisantes ;

* l’absence d’accompagnement et de soutien adaptés des ressources humaines ;

* des formations insuffisantes voire inexistantes ;

* l’isolement des personnels ;

* des manœuvres d’intimidation, voire des menaces ;

L'objectif étant de parvenir à plus de 20 000 départs, ce qui avait causé une large dégradation des conditions de travail des salariés concernés, causant des arrêts de travail et dégradation de l'état de santé allant jusqu'au suicide de certains d'entre eux.


Procédure :
  • Un syndicat a porté plainte en dénonçant les conséquences humaines de cette politique. ​

  • La société et ses dirigeants ont été poursuivis et condamnés pour « harcèlement moral au travail ». ​


En effet, à l'issue de l'enquête la Cour d'appel de Paris est entrée en voie de condamnation le 30 septembre 2022 (CA Paris, 30 sept. 2022, n° 20/05346) en reconnaissant l'existence d'un harcèlement institutionnel.


Une partie des dirigeants a formé un pourvoi à l'encontre de l'arrêt estimant que le harcèlement moral institutionnel, tel que retenu à leur encontre ne répondait pas au principe de légalité des délits et des peines.


Le contexte juridique

Pour mémoire le principe de légalité des délits et des peines induit que :

  • Les actes constitutifs de crimes ou délits et les peines doivent être définis précisément par la loi. ​

  • Le juge doit interpréter strictement le droit pénal, mais peut tenir compte des raisons de l'adoption d'un texte pénal en cas d'incertitude. ​


Définition du Harcèlement Moral au Travail :

  • Il s'agit d'agissements répétés dégradant les conditions de travail, portant atteinte aux droits et à la dignité des salariés, altérant leur santé physique ou mentale, ou compromettant leur avenir professionnel. ​

    Le code pénal (art. 222-33-2) incrimine ce type de harcèlement. ​



  • Harcèlement Moral Institutionnel :

    • Ce terme désigne une politique d'entreprise dégradant les conditions de travail de manière consciente. ​

    • Le code pénal ne mentionne pas spécifiquement cette dimension institutionnelle, mais la cour d'appel a condamné la société et ses dirigeants sur cette base.


La position de la Cour de cassation :

La question posée était de savoir si les dirigeants peuvent être condamnés pour avoir mis en œuvre une politique d'entreprise dégradant les conditions de travail des salariés par un harcèlement institutionnel (notion jusqu'alors inconnue en tant que telle).


La réponse est oui.


Le « harcèlement moral institutionnel » entre bien dans le champ du « harcèlement moral au travail » tel que le conçoit le code pénal.  


En effet, le législateur a souhaité donner au harcèlement moral au travail la portée la plus large possible. 

La loi :

  • n’impose pas que les agissements répétés s’exercent à l’égard d’une victime déterminée ;

  • n’impose pas que les agissements répétés s’exercent dans une relation interpersonnelle entre l’auteur et la victime > le fait qu’auteur et victime appartiennent à la même communauté de travail est suffisant.


La loi permet de réprimer les agissements répétés qui s’inscrivent dans une « politique d’entreprise », c’est-à-dire l’ensemble des décisions prises par les dirigeants ou les organes dirigeants d’une société visant à établir ses modes de gouvernance et d’action. 


Cette interprétation du texte n’était pas imprévisible, d’autant plus pour des professionnels qui avaient la possibilité de s’entourer des conseils éclairés de juristes.


La cour d’appel a établi par des motifs suffisants l’existence d’agissements de la part des prévenus caractérisant le délit de « harcèlement moral institutionnel » ou la complicité de ce délit.


Les pourvois des dirigeants sont donc rejetés : les condamnations sont définitives.


CF. le communiqué de presse publié sur la décision :



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