Dénonciation d'une situation harcelante : Une réaction rapide et appropriée exonère l'employeur de toute faute.
- INVICTAE
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Les faits
Une salariée a été engagée en qualité d’agent temporaire puis la relation de travail s’est poursuivie dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée à partir du 25 juillet 1999. Son contrat de travail a fait l'objet d'un transfert à compter du 1er janvier 2007. Au dernier état de la relation de travail, la salariée occupait le poste d’assistant technique, niveau 1, classe E3.
Le 9 mars 2017, la salariée a adressé un courriel ou elle expose clairement être en souffrance à cause de sa supérieure. Elle réitère ces propos lors de sa main-courante du 27 mars 2017 et par courrier officiel du 18 avril 2017 où elle a sollicité qu'il soit procédé à une enquête concernant ses faits.
Le 3 octobre 2017, la salariée a complété une déclaration de maladie professionnelle relative à un mouvement anxiodépressif et épuisement dans un contexte de souffrance dite par la patiente liée au travail.
L'enquête mise en œuvre, à la demande de la salariée a conclu que le mal-être de ses collègues était lié à son comportement agressif, ce qui aurait créé une ambiance pesante au sein du service. Sur la base de ces conclusions, l'employeur a maintenu un dispositif spécifique pour accompagner la salariée à sa reprise, incluant des entretiens hebdomadaires, un suivi régulier, et la mise à disposition d'un psychologue.
Le 1er mars 2018, le médecin du travail a déclaré la salariée inapte à tout poste avec dispense d’obligation de reclassement.
Le 4 mai 2018, elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
La salariée a estimé avoir subi un harcèlement moral et reproché à son employeur de ne pas avoir respecté son obligation de sécurité.
La procédure
La salariée a exposé avoir été victime d’une situation de harcèlement moral sur son lieu de travail au cours des années 2014 à 2017 et que son inaptitude définitive à son poste aurait pour seule origine son état dépressif réactionnel aux agissements de harcèlement moral dont elle a fait l’objet.
Au soutien de sa demande, la salariée a mis en lumière :
— avoir été exclue de toute promotion ou évolution professionnelle
— une dégradation des relations de travail
— un retrait de ses tâches habituelles à partir de janvier 2017 et une situation d’isolement.
Elle a contesté le bien-fondé de son licenciement devant la juridiction prud’homale, qu’elle a saisie le 10 août 2018. Elle a été déboutée, tant en première instance, qu'en appel.
En effet la Cour d'appel de Bordeaux (CA Bordeaux, ch. soc. sect. b, 14 sept. 2023, n° 20/02293) a pu juger que la situation harcelante n'était pas constituée et que la société a pris des mesures pour analyser les causes des tensions internes et tenter de les résoudre sans qu’il puisse lui être reproché d’avoir manqué à son obligation de sécurité. La salariée a formé un pourvoi en cassation.
Les prétentions des parties
Les prétentions de la salariée, sont les suivantes :
Reconnaissance du caractère abusif de son licenciement : Elle a contesté le bien-fondé de son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement, en invoquant un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.
Demande de dommages-intérêts : Elle a réclamé des dommages-intérêts pour le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, en lien avec le harcèlement moral qu'elle estime avoir subi.
L'employeur y répondait de la manière suivante :
Refus des accusations de harcèlement moral : L'employeur a soutenu qu'il n'a eu connaissance des difficultés et du mal-être de la salariée qu'en mars 2017, et qu'il a immédiatement pris des mesures pour y remédier.
Actions mises en place : L'employeur a affirmé avoir agi de manière proactive en mettant en place un suivi par le médecin du travail et la direction des ressources humaines, en diligentant une enquête interne, et en instaurant des dispositifs spécifiques pour accompagner la salariée, notamment des entretiens hebdomadaires, un suivi régulier, et la mise à disposition d'un psychologue.
Rejet des prétentions de la salariée : L'employeur a considéré qu'il n'avait pas manqué à son obligation de sécurité et que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement est justifié.
L'apport
Par une décision du 9 avril 2025, la chambre sociale de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formée par la salarié ( Cass. soc., 9 avr. 2025, n° 23-22.121).
L'apport de cet arrêt réside dans la clarification des obligations de l'employeur en matière de sécurité et de prévention du harcèlement moral, conformément aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail.
La Cour de cassation rappelle que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité envers ses salariés, doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer leur sécurité et protéger leur santé physique et mentale. Cependant, cette obligation n'est pas méconnue si l'employeur justifie avoir pris toutes les mesures prévues par la loi.
Dans cette affaire, la Cour a validé la décision de la cour d'appel, qui avait estimé que l'employeur avait agi dès qu'il avait eu connaissance du mal-être de la salariée en 2017, en mettant en place un suivi médical, une enquête interne, et des dispositifs spécifiques pour accompagner la salariée.
Ainsi, l'employeur n'a pas été considéré comme ayant manqué à son obligation de sécurité. Cet arrêt souligne l'importance pour l'employeur de réagir rapidement et de manière appropriée dès qu'il est informé de situations de harcèlement ou de mal-être au travail.
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